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Compte-rendu de la cÉrÉmonie de remise de la mÉdaille des Justes au Pasteur Pierre Gagnier et son Épouse HÉlène

18 janvier 2012

Discours de Michèle Blumenthal (Maire du 12e arrondissement de Paris)

Monsieur le Directeur des Relations Publiques et de la Communication à l'ambassade d'Israël,
Monsieur le délégué du comité français pour Yad Vashem,
Madame la présidente des Enfants et Amis Abadi,
Mesdames, Messieurs les élus
Mesdames, Messieurs

C'est un immense plaisir et un honneur de vous accueillir ce soir à la Mairie du 12e. Nous sommes réunis ce soir pour remettre aux ayant droit de Pierre et Helene Gagnier la médaille des justes entre les nations à titre posthume.

Nous sommes partagés entre des émotions contradictoires. La honte face à la collaboration et l'admiration face à l'héroïsme des justes. Oui, il y a soixante-dix ans, à Paris, c'était la rafle du vel d'Hiv. Soixante-dix ans ! C'est proche et lointain à la fois.

Dès la conférence de Wansee, en janvier 1942, la déportation des juifs d'Europe est organisée minutieusement. Le terme de "solution finale" est prononcé. Alors, face à la coalition de l'indifférence et de la haine, six millions d'hommes et de femmes sont condamnés à être traqués, à disparaitre, à être exclus de la communauté humaine. Six millions d'hommes, de femmes et d'enfants morts parce que la lâcheté et  la collaboration furent les instruments de ce génocide. Comment comprendre que la France, pays des droits de l'Homme, ait pu laisser faire, accepter, ne rien dire ? Comment comprendre ceux qui tout simplement détournaient le regard devant ces autobus qui transportaient leurs victimes ? Ici même, à Paris, ville des droits de de l'Homme, des juifs qui avaient fui de ghettos en ghettos, qui croyaient avoir trouvé le droit d'être tranquille. Tranquille ! La France avant tous les pays d'Europe leur avait dit "Vous êtes français".

Le pire s'est produit mais heureusement les justes ont évité à la France de perdre son identité. Les justes, dans un monde plongé dans l'indifférence, sont restés debout, dignes et lucides malgré les périls et la mort, ils ont chois l'humanité. Car comme le disait le Pasteur Trocmé "Nous ignorons ce qu'est un juif, nous ne connaissons que des Hommes".
Ce qui est bouleversant dans leur témoignage c'est qu'ils considèrent que leur actes étaient normaux, évidents. Guidés par leur refus de tolérer l'intolérable, ils ont permis de sauver les trois-quarts des juifs français, alors que les trois-quarts de ceux d'Europe sont morts. En sauvant un juif, ils ont sauvé l'humanité.

Le Pasteur Gagnier et sa femme étaient de ceux là.

Le Pasteur Gagnier fait la drôle de guerre en Alsace. Il est fait prisonnier en Westphalie. Libéré en 1941, il est nommé pasteur de l'Église réformée de Nice. Pendant les années d'occupation, Pierre Gagnier, en accord avec sa femme, n'hésite pas à cacher des juifs dans le presbytère et le temple. Presbytère qui devient l'annexe de fabrication de faux papiesr. Il confectionne cartes d'identité, des cartes d'alimentation, trouve des lieux de cache et fourni des vivres, de l'argent et organise des évasions.

En juin 1940, Moussa Abadi arrive à Nice. Odette le rejoint et occupe les fonctions de médecin dans un dispensaire de l'O.S.E (Oeuvre de Secours aux Enfants). Moussa rencontre un Aumônier des troupes italiennes basées à l'est de l'Europe. Cette entrevue est déterminante dans la prise de conscience du danger à venir : l'occupation par les Allemands de Nice. Moussa et Odette décident d'organiser le sauvetage des enfants juifs. Plusieurs enfants du réseau marcel seront cachés grâce aux familles sollicitées par le pasteur Gagnier. Sa connaissance de la langue allemande lui permet d'aller à la gestapo pour obtenir des renseignements. Il ne craint pas de se rendre à la Kommandantur pour crier son indignation.

Ce héros de l'ombre et sa femme vont recevoir aujourd'hui le titre de Justes parmi les Nations. Tous deux ont réussis, sans armes, sans coup de feu, armés de leur courage et de leur détermination, à mener le combat essentiel : préserver la vie. IIs ont donné sens à la devise républicaine "Liberté Egalite Fraternité".

Dans notre arrondissement, pas très loin de la Mairie, vivaient, rue de Reuilly, Odette et Moussa Abadi. Depuis 2008, une place du 12e porte leur nom. Et la mairie du 12e est honorée que ce soit dans cet arrondissement que la cérémonie de ce soir ait pu avoir lieu..

Michèle Blumenthal
Maire du 12e arrondissement de Paris

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